L'avant-garde se meurt…. Mais ne se rend pas.
Le militantisme s'est beaucoup construit autour de la notion d'avant-garde, expression tirée du jargon militaire ou encore des milieux artistiques. Dans un contexte de guerre, il s'agit en fait de la « Partie d'une armée ou d'une flotte, chargée en avant du corps principal, de renseigner celui-ci au cours des opérations et, plus généralement, d'assurer sa sécurité ». Deux éléments principaux seraient donc à retenir de cette notion : celle de renseignement et celle de sécurité.
Dans l'art, l'avant-garde désigne un mouvement novateur qui casse les règles académiques.
L'emploi politique du mot lui donne un tout autre sens : non seulement ceux qui revendiquent le terme assurent rarement la sécurité mais elles gardent souvent pour elles les renseignements qu'elles ont. Elles sont plutôt les gardiennes des pratiques éculées que les créatrices de nouvelles pratiques.
C'est pourquoi en matière politique, l'expression est de suite suspecte. Elle désigne un petit groupe de personnes qui sait la marche à suivre pour prendre le pouvoir. Dès lors, l'avant-garde désigne une forme d'élite avec le risque évident que celle-ci prenne le pouvoir pour elle même et ne le laisse plus.
Dire cela n'amène pas à grand-chose. L'inverse de l'avant-garde est supposé être l'auto-organisation. Mais qui a déjà participé à une association, un collectif, une organisation politique, une occupation, un camp d'été ou un syndicat sait qu'il ne suffit pas de la nommer pour que l'auto-organisation soit. L'égalité ne se décrète pas, elle se construit. Si la notion d'avant-garde se meurt, celle-ci renaît sous des formes diverses dans les pratiques d'un parti politique comme le NPA ou avec le parti (qui ne s'assume pas comme tel) France Insoumise, mais aussi chez les manifestant-e-s de ce qu'on a appelé le cortège de tête lors du mouvement contre la loi travail ou encore dans l'attitude des leaders syndicaux.
On constate aussi que les plus prompts à critiquer les bureaucraties syndicales ou l'immobilisme des partis sont souvent ceux qui, dès qu'ils occupent les places de choix, sont les plus prompte à verrouiller la porte derrière eux, formant à leur tour une avant-garde éclairé.
Peut-être peut-on finalement se réjouir de la diversité des avant-gardes car elle garantie l'absence de domination de l'une d'entre elle sur les autres. Reste à savoir si ce n'est pas ce qui freine l'unité tant attendu de la gÔche.
Ah contradiction quand tu nous tiens !